mardi 8 avril 2025

 Débutons nos pérégrinations algéroises par un livre qui semble subsumer tous les autres ou du moins une partie de ceux que nous avons choisis car il nous propose de remonter le cours de l’histoire, des origines jusqu’à l’époque moderne, au début de la période coloniale. Alger des Bani Mazghanna vient à notre rencontre et se livre dans le beau livre que lui consacre notre collègue historien et archéologue, Abderrahmane Khelifa1 qui nous présente un exposé exhaustif de l’histoire de la ville de la préhistoire à la période coloniale. Bien documenté, accessible aux non spécialistes, agrémenté d’une belle iconographie, l’ouvrage imprimé sur un papier luxueux de couleur beige façon vieux livre, nous narre l’histoire des monuments de la ville comme autant de traces, d’empreintes des différents peuples qui l’ont habité et ont bâti ces vestiges qui nous renseignent sur leurs mœurs et leurs coutumes. Des bouleversements, Alger en a connu mais A. Khelifa va surtout insister sur la période qui a vu la splendeur de la ville au zénith de sa gloire, la période de la Régence d’Alger plus communément connue comme la période ottomane, notre ville et son arrière-pays constituant la partie la plus occidentale de l’Empire ottoman. C’est au cours de cette période qu’ont été édifiés les plus beaux édifices. L’auteur nous en donne une liste relativement complète et c’est alors que nous submerge soudainement un souffle de nostalgie devant le nombre de ceux qui ont disparu, détruits par la violence de la conquête coloniale et sa volonté d’imprimer, elle aussi, sa marque sur les décombres de celle qui fut Alger Almahroussa, Alger la bien gardée ! Certes, certains de ces édifices vont être, dans un élan réparateur de la puissance coloniale mais aussi, des autorités algériennes après l’indépendance classés au patrimoine national ! A. Khelifa nous les répertorie non sans s’inquiéter sur les procédés et les processus utilisés pour les restaurer et les sauvegarder ! Car, si le Bastion 23 ou Palais des Raïs a pu retrouver ses splendeurs d’antan et que la villa Abdellatif connaît des travaux prometteurs d’une résurrection réussie, qu’en est-il de la villa Mahieddine, récemment sauvée du naufrage et de la prédation et des palais de la Casbah ? Une récente visite dans ce quartier emblématique d’Alger, nous a fait mesurer les dangers et les dégâts que pouvait résulter d’une restauration rapide, mal conduite et mal pensée ! Coller des céramiques dont les couleurs modernes jurent avec celles anciennes met à mal la cohérence et l’authenticité de tout l’édifice. La restauration doit se faire en respectant autant que faire se peut les manières de faire anciennes et il existe des artistes et des artisans qui s’efforcent de les retrouver, pourquoi ne pas les avoir associés alors, à l’entreprise ? Nous l’aurons compris, cet ouvrage est à la fois une ode et un hommage à la ville mais aussi, un appel à la nécessité de sauvegarder ses beaux atours et plus particulièrement, son cœur palpitant qui n’en finit pas de pleurer les outrages du temps, de la nature et des hommes, la Casbah.